Jeudi 26 mars 2020, je vais me souvenir de cette date !
Depuis quelques jours, une soirée au “Buddha Bar” fait un grand bruit dans mon quartier, mais aussi dans tout le Vietnam. En effet, plusieurs personnes infectées ont participé à cette soirée et ont potentiellement contaminé d’autres personnes, qui sont depuis lors dans la nature.
Par précaution, la semaine du 23 mars 2020, nous avions décidé de travailler de chez nous, et de commencer l’auto-confinement. En effet, à partir de cette soirée, tout s’est très vite accéléré dans la ville, et dans le pays. Les petits commerces, bars, salons de coiffure, massages… fermaient au fur et à mesure.
Ce fameux 26 mars, je travaille tranquillement avec Tifenn chez elle, quand en fin de matinée, mon téléphone sonne...
Nam, le propriétaire de mon logement me demande de venir immédiatement au logement.
Il me dit que des policiers veulent me parler “au sujet du coronavirus”.
Du coup, j’en parle à Tifenn, qui décide d’appeler Nam pour en en savoir plus. Je commence à stresser mais j’essaie de garder mon calme.
Je décide donc de prendre dans la foulée un “xe ôm” (un moto-taxi) et de rejoindre mon logement.
Lorsque j’arrive sur place, je découvre ma rue bloquée par des policiers, je m’interroge, je ne comprends pas et je demande à passer car on doit m’interroger. Mais ça reste très flou à ce moment précis, l’homme en face de moi finit par me comprendre et me laisse rentrer chez-moi.
A l’intérieur, plein d’hommes en combinaison bleue vont et viennent, ils passent la maison au peigne fin... Savez-vous comment je les appelle ? Les schtroumpfs !
Je vais voir mon proprio en lui demandant ce qu’il se passe et il me répond la phrase suivante “ Quelqu'un de notre immeuble est peut-être potentiellement contaminé par le Covid-19 “.
Ma réaction a été la suivante : “Comment cela peut-il être possible ?“, “Pourquoi nous, notre maison..?“ Bref, je commence à comprendre et me pose plein de questions, je n’ai jamais vu personne circuler dans le logement. En effet, je suis arrivé 3 jours plus tôt car j’ai changé de maison, ce n’est plus celle que je vous ai déjà décrite ;) Je voulais changer, et elle se trouve dans l’autre rue parallèle. Mais revenons à cette histoire…
Qui ça peut bien être ? À part les deux propriétaires, j’ai jamais été en contact avec qui que ce soit depuis que je suis arrivé ici.
Je suis dans la pièce commune, on me fait passer aussitôt un test de Covid-19 ; une sorte de coton tige dans le nez et dans la bouche, cela dure 30 secondes.
Ensuite, j’ai dû répondre à des questions que la personne en face de moi me posait.
J’ai dû me justifier sur mes déplacements depuis les deux semaines précédentes, avec qui j’ai mangé, où je suis allé, avec qui j'ai parlé, et leurs coordonnées si besoin.
Mais la question essentielle à leurs yeux : “As-tu été au Buddha Bar ?“
Bien sûr, je réponds que non.
Ensuite, après 1h30 assis sur une chaise devant mon brouillon, “l’enquête” se termine.
Je demande ce qu’il va se passer maintenant. Nous devons attendre les résultats de la personne potentiellement contaminée. Il s’agirait d”un homme brésilien, qui occupe le studio dans lequel je dois emménager le dimanche suivant car il est plus grand.
Les résultats tombent et mon voisin de palier est confirmé positif au COVID-19 et sera alors conduit directement à l’hôpital.
La décision tombe alors très vite et tous les résidents de mon logement vont être conduits dans un centre de quarantaine. Oui oui, vous avez bien lu, ce n’est pas une blague…
Tout est allé très vite, on a fait nos bagages à l’arrache, attendu 45 min dehors, et pris un bus local.
Sur la route, c’est interminable, le bus s’arrête dans plein d’endroits différents pour récupérer d’autres personnes ayant été potentiellement en contact avec des personnes contaminées. Mais ils sont très sympas, et très efficaces.
Le problème à ce moment là, c’est qu’on sait toujours pas, si on est testé positif ou négatif (les gens de mon logement ou les autres de l’extérieur).
Et donc, je sais pas du tout dans quoi on s’embarque, dans quel endroit on va dormir, je sais qu’on doit aller dans le district 9, apparemment un endroit très bien, mais quel genre ?
Arrivé sur place, de nuit, c’est finalement dans le centre de formation de l’administration vietnamienne que je vais passer ma nouvelle colonie de vacances. Après la prise de température, bagages à la main, nous partons en direction de nos dortoirs respectifs.
Je découvre donc mon “nouveau chez-moi”, une grande pièce avec 4 lits, des bureaux, des chaises...et juste devant moi, la première chose que je vois c’est un seau, un ballet, des produits pour faire le ménage. J’adore ça.
Je m’avance un peu dans la pièce, et je ne vois pas de matelas, juste des nattes souples que l’on pose sur le lit, à la vietnamienne. J’apprends plus tard que je suis dans un centre qui forme des hauts cadres de l’administration, dans l’esprit du Parti bien entendu.
J’ai des WC et une “salle de bain” correcte. Et des barreaux aux fenêtres, un classique au Vietnam, bon ça fait ambiance Prison Break, ça me va. Et je suis seul dans ma chambre.
“Restons positif et calme”. C’est la vie, nous sommes ici car c’est le Vietnam, ils ne rigolent pas et si c’est le mieux pour notre santé, il faut l’accepter.
Je garde le sourire en rassurant mes proches tous les jours, je suis en sécurité ici et je suis nourri matin, midi et soir. Ce sont des plats uniquement vietnamiens avec beaucoup de riz, ce qui me permet de découvrir la nourriture. Il y a 3 Coréens, une Américaine et un Français à mes côtés (ils viennent tous de mon logement).
Ma famille et mes amis sont extrêmement surpris de me voir ici, mais je me retrouve une nouvelle fois livré à moi-même, ça ne me dérange pas.
Au fil des jours, je trouve des choses à faire entre le sport et le télétravail.
Bien entendu, tous les jours, j’ai continué à travailler avec Tifenn et Guillaume via les réseaux. Ils ont été super sympa avec moi, en prenant de mes nouvelles régulièrement.
Et ça me booste pour la suite...
Pendant ces deux semaines, j’ai pu apprendre à connaître Dung, notre représentant dans le nord du Vietnam. On s’est appelé pratiquement tous les jours au téléphone. Il m’a appris beaucoup de choses sur son pays, m’a raconté des histoires, des anecdotes et ses expériences passées au sein de notre agence. J’ai hâte de le voir un jour et de partir à la découverte du nord ensemble !